L’interview et la traduction ont été réalisés par XofMdS.
Tim Wagonner est l’auteur du roman Planet Havoc.
2022-07-29 :
1/ Quelle est ta référence de culture populaire absolue ? Et celle spécifique aux univers zombies (si différente) ?
Ca serait probablement le monde décrit dans les films de zombie par George Romero. Ce furent les premiers films de zombie que je voyais. Aimant tous ses films de zombie, La Nuit Des Morts-Vivants reste ma première expérience du concept contemporain du zombie – une créature non morte qui se nourrit de la chair des vivants et dont la morsure est contagieuse – et ainsi je dois le poser comme mon numéro un définitif.
2/ Peux-tu te présenter en quelques mots ?
J’ai 58 ans, je vis en Ohio (Etats-Unis), suis professeur d’Anglais qui enseigne la composition et la création littéraire à l’Université Sinclair, et j’ai publié près de 50 romans et 200 nouvelles, et j’ai gagné trois fois le Prix Bram-Stoker. Je suis marié à une femme formidable, artiste et fauconnière, père de deux femmes adultes dont je suis très fier, et je suis fan de bandes dessinées, livres et films d’horreur depuis que j’ai vu Frankenstein Rencontre Le Loup-Garou (1943) à l’âge de 4 ans.
3/ Quels genres de jeu aimes-tu ? Joues-tu à Zombicide ?
Je n’aime pas vraiment jouer aux jeux, mais j’aime les univers des jeux. J’adore les mondes et les personnages – ils stimulent mon imagination et j’imagine des histoires dans ces mondes. Parfois, je suis même embauché pour écrire ces histoires !
4/ Quel est ton jeu favori tout de même ?
J’apprécie les jeux de rôles plus que toute autre forme de jeu, et c’est à Donjon & Dragons que j’ai le plus joué. J’aime le fait d’y raconter des histoires ainsi que d’y prétendre être un personnage. J’aime aussi vraiment l’expérience communautaire de jouer en groupe, chacun construisant l’histoire à mesure que nous jouons.
5/ Quel jeu de plateau Zombicide est ton préféré ?
En termes d’univers, Invader est mon préféré parce que l’aspect futuriste et science-fictif crée des possibilités d’histoires plus intéressantes pour moi. Mais j’apprécierais d’écrire des livres dans les autres univers aussi. Je pense que cela serait amusant.
6/Peux-tu me confirmer qu’écrire sur des zombies n’est pas réservé aux fous ?
De temps en temps des gens me demandent comment je peux écrire de l’horreur en étant aussi gentil. Ceux qui écrivent de l’horreur – dont des histoires de zombie – sont comme les autres. Nos imaginations peuvent pencher vers des idées plus sombres, mais nous n’écrivons pas sur l’horreur parce que nous aimons la mort et la violence dans le vrai monde. Nous trouvons les histoires à propos d’horreurs fictives amusantes à lire et écrire.
7/ Quel type d’histoire/univers, de façon générale, est ton préféré pour stimuler ton imagination ?
J’aime combiner l’horreur et la dark fantasy et produire des histoires qui sont comme des cauchemars surréalistes. Ce genre d’histoire me fascine – le mystère, les images bizarres, l’intrigue de nature onirique… Des films comme ceux de David Lynch ou L’Antre De La Folie de John Carpenter (1995) sont parmi mes histoires de cauchemar surréaliste favorites.
8/ Quelle est la chose que tu préfères écrire ? Redoutes d’écrire ?
J’adore écrire à propos de ce que les personnages pensent et ressentent au fur et à mesure que la scène progresse. Qu’importe le type d’histoire que vous racontez, toutes les histoires sont à propos des personnes dans leur cœur, et je pense que c’est important de décrire les personnages de façon la plus réaliste possible, même s’ils sont confrontés à des évènements irréels – comme une apocalypse zombie !
La chose que je redoute le plus d’écrire est l’action. Je ralentis toujours quand j’atteins une scène d’action car ça me prend plus de temps de découper la progression des évènements pas à pas. J’aime ces scènes finies, mais je dois les travailler davantage que les autres, d’autant qu’il y avait beaucoup de scènes d’action dans Planet Havoc !
9/ Laquelle de tes œuvres est ta préférée (sans joker « impossible de choisir ») ?
Ma favorite est probablement mon roman Nekropolis, un mélange d’horreur, de fantasy urbaine, de mystère à propos d’un détective zombie qui résout des crimes dans une ville de monstres. Il a été traduit en français il y a quelques années [en 2011, par Sandy Julien, édition Eclipse].
10/ Qui est ton personnage préféré dans Planet Havoc ?
Oren [Tisdale] était très amusant à écrire parce que j’ai du imaginer ce que ce serait d’être un cerveau humain dans un corps artificiel – en particulier si vous devenez cyborg enfant et que vous passez la majorité de votre vie cyborg. Ecrire ce personnage était un défi, donc j’en fais mon préféré.
11/ Comment en es-tu venu à travailler sur une licence de CMON ?
Aconyte Books a eu une licence pour produire des romans Zombicide. J’avais déjà travaillé avec l’éditeur d’Aconyte – Marc Gascoigne – donc je l’ai approché pour écrire un roman pour Aconyte. Il a suggéré que j’essaye d’écrire une histoire pour Zombicide : Invader, et le résultat fut Planet Havoc. J’ai toujours apprécié de travailler pour Marc, et j’ai été emballé à nouveau.
12/ Quel a été ton premier truc imaginé pour Zombicide ?
J’ai d’abord considéré de poser mon histoire sur la même planète que le jeu, mais j’ai décidé de la poser sur un monde différent pour que les lecteurs puissent imaginer leurs parties sur le monde initial. Ainsi, les lecteurs peuvent imaginer leurs parties comme réelles et mon histoire peut être réelle dans ce même univers ludique sans interférer avec leurs parties.
13/ Y a-t-il des références cachées au Zombicide officiel dans Planet Havoc ?
J’ai pris soin d’inclure autant d’éléments du jeu et des comics que je pouvais – les armes, les armures, les différents types d’extraterrestres, les conflits entre groupes de survivants – mais je ne suis pas sûr que cela soit qualifié d’œuf de Pâques.
14/ Quelles directives donne CMON ? Quelle liberté as-tu avec Planet Havoc ?
Les créateurs du jeu m’envoyèrent du matériel en référence qui m’aida à m’approprier le monde de Zombicide : Invader. Ensuite je présentais deux idées à mon éditrice Aconyte, qu’elle fit suivre aux créateurs du jeu, et ils choisirent l’idée qu’ils préféraient. J’écrivis ensuite les contours et les repris d’après les instructions de mon éditrice, puis les créateurs du jeu les lirent, firent leurs retours et je les repris encore. Quand ils approuvèrent les contours, je commençais à écrire le livre. Quand le livre fut terminé, je reçus des suggestions de révisions par mon éditrice comme par les créateurs du jeu, alors je repris le livre et mon éditrice comme les créateurs du jeu l’approuvèrent.
Les créateurs du jeu étaient impliqués à chaque étape – après tout, Zombicide est leur création – et ils s’assurèrent de me faire savoir lorsque quelque chose que j’écrivais devait plus s’aligner avec le monde qu’ils créèrent ou si quoi que ce soit ne collait pas. Ils furent d’une grande aide !
15/ Quelle différence avec tes autres romans ?
Quand j’écris des romans originaux, j’ai bien plus de liberté. Je peux écrire ce que je veux. Mais parfois c’est un défi amusant que d’écrire une histoire dans un univers que je n’ai pas inventé, la raison pour laquelle j’apprécie d’écrire en lien avec d’autres médias.
16/ L’univers de Zombicide : Invader était peu décrit, en dehors de PK-L7. Tu ajoutes une foisonnée d’éléments, depuis des races extraterrestres jusqu’à des organisations (secrètes), etc. Tout cela devient canon. Cela veut-il dire que tu es responsable de ce cadre ?
Je n’ai pas créé la race Empusa, même si j’ai inventé quelques détails sur leur apparence et leur psychologie. J’ai inventé les autres éléments que tu mentionnes. J’ai lancé mon histoire un siècle après l’action du jeu afin que les lecteurs qui jouent à Zombicide puissent croire que tout ce que j’ai créé commence entre le jeu et le roman.
Je me suis dit que si j’ajoutais quoi que ce soit à mon histoire qui ne plaise pas aux créateurs du jeu, ils me le diraient, afin que je le change ou l’efface. Mais ils étaient contents de ce que j’ajoutais à l’univers. Parfois, quand on écrit des raccords, la propriété intellectuelle avec laquelle on travaille n’est pas développé avec beaucoup de détails, et on a besoin de créer davantage cet univers, ses personnages, comment les choses fonctionnent, etc. C’est ce que j’ai du faire dans Planet Havoc.
17/ Dans l’hypothèse d’une suite, puis-je apporter la lumière sur la société StarShade Inc., une Guilde spécialisée dans la colonisation spatiale et tout ce dont elle a besoin pour cela (y compris une milice privée) ? (pas une vraie question, plutôt du lobbying pour du contenu fabriqué par la communauté de fans)
Je vais garder cela en tête.
18/ Comment décrirais-tu l’un de tes jours au travail typique ? Une semaine typique ?
J’essaie d’écrire tous les jours, sauf quand j’enseigne, bien sûr. Je me lève tôt, autour de 5h du matin, et j’écris plusieurs heures. J’écris plusieurs heures dans l’après-midi. Je trace les contours de toute l’histoire, pour moi, avant de l’écrire, mais de temps en temps je vais écrire des contours supplémentaires, plus courts, pour me guider le long de scènes particulières (comme les séquences d’action). J’écris sept jours par semaine d’habitude, mais puisque j’aime tant écrire, ça ne m’apparait pas comme du travail. Si je rate un jour pour quelque raison, je ne m’en inquiète pas, et m’y remets le jour d’après.
19/ Peux-tu nous décrire ton procédé créatif sur Planet Havoc ?
Quand j’ai commencé à réfléchir au genre d’histoire que je pourrais écrire pour Zombicide : Invader, j’ai fait autant de recherche que j’ai pu. J’ai lu tout le matériel de référence qui m’avait été envoyé par les créateurs du jeu, et j’ai lu les comics Zombicide : Invader. J’ai acheté le jeu afin de me familiariser avec ses mécaniques, autant que pour me référer aux visuels du jeu quand j’écrivais. J’ai aussi mis les figurines de la boîte sur mon bureau autour de mon ordinateur pour m’inspirer dans mon écriture. J’ai regardé des vidéos de partie sur YouTube pour voir ce que ça faisait de jouer, pour faire mon roman aussi proche du jeu que possible. J’ai aussi fait des recherches d’images sur Google pour trouver autant d’images que possible – personnages, extraterrestres, vaisseaux spatiaux, armes, combinaisons spatiales – pour une description précise. Et comme dit plus tôt, les créateurs du jeu étaient impliqués à chaque étape, donc ils firent en sorte que je reste fidèle au jeu et aux détails de son univers.
20/ Un élément Zombicide dont tu es responsable et fier ? Finira-t-il dans le jeu ?
Puisque mon histoire se déroule sur une autre planète que le jeu, J’ai pu créer mes versions des différents types de zombie. J’ai aussi inventé une intelligence centrale qui les commande tous, appelé l’Invocateur (the Summoner). Je ne sais pas si les créateurs du jeu les ajouteront à Zombicide : Invader, mais quand on écrit un roman en lien avec d’autres médias, les ayants-droits de la propriété intellectuelle possèdent tout ce que l’on crée pour le livre, tous les personnages et concepts. Donc si les créateurs du jeu veulent importer n’importe quel élément de Planet Havoc dans le jeu, ils peuvent, et je pense que cela serait génial s’ils le faisaient.
21/ À l’inverse, y a-t-il eu quelque chose qui fut retiré parce qu’il ne collait pas ?
Les créateurs du jeu me demandèrent des ajustements mineurs sur un peu d’éléments que j’ajoutais, mais ils ne m’ont rien demandé d’enlever.
22/ As-tu en ce moment un autre roman en cours ? Un quelconque projet Zombicide secret en cours ?
Je vais commencer un autre livre. J’en ai déjà fini deux : Writing In The Dark et Writing In The Dark : The Workbook [Ecrire Dans L’Obscurité : Le Manuel]. Des livres sur la rédaction d’horreur, et bien qu’ils soient uniquement en Anglais pour le moment, j’espère qu’ils seront traduits dans d’autres langues un jour.
En ce qui concerne de futurs projets Zombicide, ni Aconyte ni les créateurs du jeu ne m’ont demandé un nouveau livre dans les collections. J’adorerais, pourtant.
23/ Quelle sorte de Survivant d’une apocalypse zombie serais-tu ?
Je mourrais probablement de suite. Puisque les apocalypses zombie sont fictives dans notre monde, si j’assistais à une épidémie dans la vraie vie, je penserais à une blague ou une sorte d’évènement publicitaire pour un film, et je regarderais les zombies s’approcher jusqu’à ce qu’il soit trop tard et qu’ils m’attrapent ! Néanmoins, j’aime à penser que je ferai un super zombie ! J’imite vraiment bien la marche zombie, et je peux gémir comme si j’étais affamé de chair humaine. Quoi d’autre pour faire un bon zombie ?
24/ Cela se produirait sur PK-L7 ou PK-L10 ?
Probablement pas. Les créatures zombies extraterrestres m’attaqueraient certainement et me réduiraient en pièces avant que je puisse m’échapper.
25/ As-tu entendu parler de notre communauté française de fans de Zombicide ?
Non, mais j’adorerais apprendre !
26/ Et on t’accueillera avec plaisir. Un mot de la fin ?
Merci de m’avoir demandé cette interview. C’était rigolo !
2022-05-02 : Paul Semel a réalisé une interview de Tim Waggoner, en anglais.